BRITAIN BLUES (3/4) Elle est politique, économique ou énergétique… Le Royaume-Uni vit ces derniers temps une crise permanente. « 20 Minutes » est allé sur place pour prendre le pouls de la population
- Les semaines se suivent et se ressemblent pour les Britanniques : c’est la crise permanente. Au niveau économique, social ou encore politique.
- Une crise qui fait des remous dans la communauté française résidant au Royaume-Uni, qui compte environ 300.000 membres.
- Mais à Londres, où 20 Minutes s’est rendu, les expatriés français l’affirment : Londres reste Londres, une ville de culture, de diversité, d’opportunités, et le charme so british opère toujours.
De notre envoyé spécial à Londres,
Christian nous a proposé de parler de son amour de la capitale britannique autour d’un diet coke. Pour Fanny, c’était un café à se partager. Et on donne le point de l’originalité à Arthur et son invitation dans sa propre crêperie, au Ta’ Turu Store. A travers ces rendez-vous, une chose est sûre : ces expatriés français à Londres ne sont pas venus ici pour leur amour de la bière. Et tant pis pour notre plan machiavélique visant à transformer ce reportage en une tournée des pubs les plus fameux de la capitale.
De toute façon, à écumer les rues de la ville depuis deux jours, il faut se rendre à l’évidence : la capitale britannique n’a plus la tête à la fête, à force de subir les impacts d’une double crise politique et économique. Après sept ans de vie outre-Manche, Christian, à la fois guide, community manager, professeur de français et 36 autres métiers, voit bien la différence : « La première fois que je suis sorti en boîte ici, je suis rentré à 4 heures du matin. Et j’étais fasciné de voir, par-delà la vitre du bus, encore tant de gens dehors. Londres était toujours remplie et vivante, H24. » Désillusion lors de sa dernière sortie, il y a quelques semaines : « En rentrant à trois heures, il n’y avait quasiment personne dehors. Les gens restent chez eux », dépeint le presque cinquantenaire, en se défendant d’être « un oiseau de nuit ».
Privilégés et charmés
La communauté française – 300.000 expatriés dans le Royaume, dont la moitié dans le Grand Londres, selon les dernières estimations – l’admet : la ville a un peu changé. Mais si les foies sont davantages épargnés, les cœurs, eux, continuent de battre d’un amour for ever and more pour London. Oui, malgré les crises, le charme opère toujours pour ces Français.
D’autant que la plupart de ces expats se considèrent « privilégiés » face au tsunami actuel de l’inflation, qui inonde jusqu’à la middle class. « Niveau revenu, on est un peu au-dessus de la moyenne », admet Fanny, 31 ans, qui travaille dans la finance à la City. Bien sûr, la hausse des prix se voit quand même : « Les taux sur les emprunts sont au-dessus de 5 %, et le prix des maisons reste incroyablement haut », se désespère Bertrand, 30 ans, directeur commercial dans une agence digitale, qui rêve d’acheter avec sa copine australienne. Sauf rares exceptions, ces exilés mangent à leur faim et continuent de sortir un peu, ce qui n’est plus le cas de la moitié des Britanniques.
« Toute la planète est à Londres, et ça se voit »
On se retrouve donc protégé de la crise économique et de la pluie londonienne – ouf, certains classiques sont toujours là – dans le pub The Chandos. Ici, Christian vante les mérites d’une « ville cosmopolite. Toute la planète est à Londres, et ça se voit. La diversité ne se cache pas, elle se montre. » Place au fameux refrain « Il n’y a pas le poids du »Qu’on dira-t-on ? ». L’atmosphère est pleine de libertés », que vous avez déjà forcément entendue d’un ou une amie de retour en Eurostar.
Autre grand classique cité : le calme britannique. Fanny place l’inévitable comparaison entre des Français qui s’écharpent pour rentrer dans le premier RER qui passe et les queues toutes en civilité pour prendre le métro londonien. Et malgré tout notre chauvinisme, le constat est difficilement contestable. La civilité anglaise ne s’arrête d’ailleurs pas à attendre calmement : « Je suis moins embêtée ici qu’à Paris. Les Londoniens sont très polis et très gentils ». Pour Arthur, le flegme britannique s’accompagne d’une tranquillité sociale bienvenue : « Il n’y a pas la bêtise des »gilets jaunes » ou les grèves de la SNCF le jour de Noël… Et quand tu appelles les services d’Etat, tu arrives à parler à quelqu’un d’aimable, alors qu’en France, pour avoir quelqu’un au téléphone, Il faut bien s’accrocher…. »
Le travail, raison principale de venir (et de rester)
Admirons un peu, entre deux interviews, la beauté de Londres. Ses marchés colorés, ses monuments, ses écureuils peu craintifs, ses maisons anciennes et ses parcs verdoyants. Là aussi, cela mérite bien quelques déclarations enflammées de nos frenchies. « Oui, c’est la crise, mais Londres garde ses musées, son histoire, sa richesse culturelle. C’est difficile de s’y ennuyer », vante Christian, alors qu’aucun serveur n’est venu prendre notre commande (le Coca Zéro ne sera jamais servi). Bertrand adore « le sentiment d’espace. On ne se sent pas du tout à l’étroit comme à Paris, il y a plein de parcs énormes en pleine ville, de quartiers différents, on n’a jamais fait le tour ». Même Arthur, qui s’assume comme « un Parisien forever », reconnaît « la beauté des nombreux espaces verts ».
Une beauté qui infuse aussi dans le travail. Fanny nous rejoint dans un café vers Tower Bridge, à quelques pas de la City. « Si j’étais à Paris, je travaillerais à la Défense, un coin que je n’aime pas. Là, j’ai les beaux quartiers à proximité, la Tamise, des endroits où il est sympa de se promener. » On a Google Mapsé : pour rallier les quais de Seine – équivalent parisien de Tower Bridge – de la Défense, il lui faudrait 1h15 à pied.
« Le Brexit a fait de la place »
Il n’y a pas que le recrutement qui l’a séduite : « On commence et on finit plus tôt, on n’est pas obligé de rester jusqu’à ce que son manager parte, ce qui laisse plus de temps pour soi-même et pour profiter de la ville ». Jusqu’à 3 heures du matin, si on bien suivi.